Publié 6 octobre 2013
dans ROMAN
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L’huile commençait à chauffer dans la poêle à frire tandis que je terminais d’étaler ma pâte à oreillettes.
Comme tous les mercredis matin le silence régnait un peu dans les chambres où les enfants devaient terminer leurs devoirs et apprendre leurs leçons.
Même Magali, à la grande désapprobation de son institutrice…
Je hochais la tête en me rappelant les critiques de l’enseignante :
« Un enfant ne doit jamais avoir de devoirs à faire à la maison.
D’ailleurs les inspecteurs d’académie sont formels sur ce point ! »
« Et cela vous étonne qu’une fois arrivés en 6e les écoliers soient désemparés et s’effondrent devant le travail personnel ?…S’ils n’ont pas été entraînés dès l’école élémentaire à fournir des efforts en dehors de la classe… »
Je m’étais contentée de cette phrase, exprimée simplement et aimablement. De toute manière j’avais compris dès l’entrée en CP de mon aîné qu’il ne fallait pas dire que l’on accompagnait leur scolarité…
Quel mécontentement lorsque j’avais dit avoir commencé à lui apprendre à lire avant d’entrer « à la grande école » !
Pourquoi cette hargne alors qu’il s’agissait uniquement de le mettre en confiance, de le sécuriser…
Pourquoi cette grogne lorsque j’avais informé que s’il n’avait pas de devoir le mercredi matin, pour qu’il ait l’habitude dès son plus jeune âge d’admettre des plages horaires privées consacrées à s’entraîner ou s’instruire seul, je lui en donnais…
Mains farineuses rincées je pris l’emporte-piècees dans un tiroir et laissai tomber délicatement dans l’huille chaude quelques ganses de pâte dentelée.
Aussitôt des crépitements emplirent la pièce et postillonnèrent gaiement.
- Je peux en goûter une ?
Sursautant à l’intrusion de la benjamine que je n’avais pas entendu descendre, je m’efforçai de faire les gros yeux.
- Voyons Magali ! Je viens juste de commencer ! Aucune n’est cuite ! As-tu calculé les cinq opérations et conjugué le verbe « jouer avec son frère » au présent et au futur de l’indicatif ?
Les billes bleues de la gourmande continuèrent de fixer les noeuds papillons qui virevoltaient sur l’huile redevenue lisse et moins bruyante tandis qu’elle affirma s’être appliquée à achever ses devoirs.
Les nageurs retournés elle surveillait l’évolution de leur bronzage afin de signaler, aussitôt qu’il serait possible, quel serait le bénéficiaire de son impatience.
Bien qu’elle stationna dans mon dos, je sentais toute son attente.
Je pris l’écumoire pour retirer le beignet le plus doré ; tandis que l’envieuse, anticipant sa destination, se précipitait vers le placard, sortait une assiette et le sucre en poudre.
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Publié 5 octobre 2013
dans ROMAN
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- Tiens maman, j’ai une enveloppe pour toi, donnée par le maître.
– Moi aussi, elle est dans mon cartable, je te la donnerai à la maison.
– Et pourquoi j’en ai pas moi ?
– Tu en auras une demain, tout le monde en a une…
– Arrêtez de crier. Attachez vos ceintures, je les lirai plus tard.
- Viens vite au lit, je caille…Quel navet ce film !
– Attends une minute, j’ai du courrier scolaire à prendre dans mon sac. Curieux…
– Quoi donc ?
– Magali apporte un formulaire d’adhésion relatif à une association de parents d’élèves, tandis qu’Axel me transmet ceux de deux autres associations. Je pensais qu’il n’y avait qu’une association par établissement.
Pourquoi l’une plutôt que l’autre…
Ne pourraient-ils pas s’entendre !?
Je vais m’inscrire en primaire auprès de la seule association présente et en secondaire à l’autre…Il n’y a pas de raison d’en favoriser une.
– Viens ! Tu rempliras les bulletins d’adhésion demain !
Je souris à l’impatient.
Ayant posé les feuillets sur le petit secrétaire calé près du radiateur, je déceinturai mon peignoir, laissai glisser rapidement sur le tapis la légère nuisette avant de me cacher sous l’épaisse couette, nue entre les bras de l’aimé.
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Publié 30 septembre 2013
dans ROMAN
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- Mais jusqu’où iront-ils !?
D’un bond je me levai du canapé, où blottie contre François je regardais comme chaque soir le journal télévisé de vingt heures.
- Ca va pas ! qu’est-ce qu’il te prend ?!
– Tu as entendu ?
– Quoi?…je m’étais un peu assoupi…huit heures par jour sans une seconde de répit…et toujours la lange de bois aux infos…
– Ils veulent instituer des tuteurs dans le secondaire. Des gens chargés de s’occuper des problèmes privés des jeunes ! Des laveurs de cerveaux…des diviseurs de familles…des…
– Eh ! calme-toi !
– Mais réalise ! L’adolescence depuis toujours est synonyme de conflit des générations.
D’un côté des jeunes, et c’est normal, qui veulent affirmer leur personnalité, et de l’autre des parents qui les aiment, mais, maladroitement, car crevés par leurs soucis quotidiens d’adultes, s’appliquent à les élever en essayant, quelle illusion, de les faire profiter de leurs expériences…
A cet âge, tous, quelles que soient leurs origines, potientiels et souhaits, sont la proie facile d’officiels qui diront partager leurs points de vues pour les amener, progressivement, aux idées qu’EUX veulent les voir adopter.
Il se réveillait, interrogatif, ouvrait des yeux ahuris…
- Mais oui, d’une part des familles aimantes-fatiguées, exigeantes-maladroites…de l’autre des « pros » de la communication plutôt jeunes qui recrutent (consciemment ou non) pour l’idéologie du jour…
Il bailla, tendit la main pour attraper une gauloise dans le paquet gisant au pied du lampadaire.
Il sourit.
Son saint-Bernard venait de reprendre un chemin de galère…
- Et que faire alors ?
- Je vais dès la rentrée scolaire prochaine m’inscrire dans une association de parents d’élèves pour mieux cerner le problème…
C’est la pub…je monte embrasser les gamins et éteindre.
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Publié 22 septembre 2013
dans ROMAN
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A llongés sur la moquette ils regardaient attristés le petit écran
M alheureux devant un tel gâchis,
A ngoissés par tant de haines aveugles
N osant se regarder ni parler
T orturés par leur premier désaccord
S emblant se juger là…
Il la serra plus fortement
la renversa sur le dos
la couvrit
L’exquise plainte entendue ils s’inondèrent d’un douloureux bonheur…
- Non, nous n’aurons pas d’enfant.
Ma douce téméraire, le spectacle de jeunes incendiant dizaine de véhicules d’innocents au nom de plus de justice ; manoeuvrés par un total éventail éco-socio-jpolitique d’irresponsables…ne te convainc dont pas de la justesse de mon analyse ?…
Elle persévérait à se taire, yeux clos d’où s’écoulaient laborieusement quelques buées par ses longs cils fermant ses paupières, étouffant sous le poids chaud de l’aimé.
Elle serra les mâchoires,
vola rapidement un bol d’air par ses narines frémissantes.
Même si tout devait sauter demain par l’inconsceince de milliards de « mammifères-hommes » et la corruption de quelques centaines de dirigeants ou hommes de pouvoirs…elle voulait jouer l’espoir sachant très bien qu’au mieux la concrétisation des efforts positifs n’apparaîtraient que dans quelques générations…
*
On devrait dire à ces gens-là,
mais mon p’tit vieux, pour qui qu’tu t’crois…
Tu n’es qu’un maillon de la chaîne,
tu n’es qu’un moment de la vie…
un moment qui passe, trépasse…
Et puis l’on t’enterre
Et puis c’est fini !
*
Il se leva lentement, prit un cigarillo dans le petit coffret en bois sculpté par les indiens Maoris visités lors de leur dernier voyage annuel…rapprocha le poisson en bronze qui gobait les cendres de trois génération de Paolo…s’éloigna d’elle…
- Où vas-tu ?
Ne pouvant s’empêcher de sourire à la voix inquiète il virevolta.
- Te chercher un livre acheté à l’aéroport d’Insbruck en venant pour tromper mon attente : un témoignage de maman.
Je voudrais t’éviter ces dilemmes qui tuent peu à peu les femmes-mères…
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Publié 21 septembre 2013
dans ROMAN
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CLOTHO
Lachésis et Atropos
ou
Au risque de déplaire
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Avant-propos
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Pour qu’un homme puisse grandir,
ce dont il a besoin c’est du libre accès
aux choses, aux lieux, aux méthodes, aux évènements, aux documents.
Cet accès lui est aujourd’hui refusé.
Lorsque le savoir devint un produit
il acquit les protections accordées à la propriété privée.
Ivan ILLICH
« Une société sans école »
Seuil
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Dorénavant
en fin de semaine
sera proposé un de mes romans
dans mes tiroirs dormant.
Petit inconvénient
apparaîtra en première page de la catégorie
la dernière publiée
obligeant à remonter le temps.
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Clotho, Lachésis et Atropos
déesses fille de Zeus
sont les Moires grecques symbolisant la Destinée
tissant le fil de la naissance, au déroulement de la vie, à la mort.
(les romains les nomment Les trois Parques).
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